THE GREENER FESTIVAL

Bellebouffe X GREENER GOOD

L’association Greener Good a organisé pour la 4ème année consécutive son festival grand public dédié à l’écologie. Les 5 et 6 octobre 2019, le Chateau de Montchat a accueilli des ateliers, conférences, défilé de mode éthique, tables rondes et espace d‘exposition pour faire découvrir aux habitant-es les initiatives et solutions en faveur du zéro déchet et de l’éco-responsabilité. Dans le cadre du festival, BelleBouffe a animé son jeu « La Belle Conf’ : vers une alimentation durable ? »

La Belle Conf’ : vers une alimentation durable ?

Principes : “La Belle Conf’ : vers une alimentation durable ?” est une conférence interactive prenant la forme d’un jeu de rôles. De l’agricultrice, en passant par le maire, l’écolier, le chargé de projet innovation d’un distributeur ou encore la directrice d’un fast food, les participants sont invités à investir l’espace de prise de parole pour débattre de la faisabilité d’un modèle alimentaire alternatif du point de vue de leur personnage. Ils et elles peuvent aller et revenir sur le devant de la scène quand bon leur semble.

Objectifs :

  • Recueillir les perceptions des participants à propos de la notion d’alimentation durable

  • Sensibiliser les participant-es à la complexité à travers la notion de système alimentaire

  • Faire connaître les initiatives existantes en faveur d’un système alimentaire plus écologique et solidaire

  • Débattre de la faisabilité d’un modèle alimentaire alternatif

Retour sur La Belle Conf’

La Belle Conf’ pense ici “l’alimentation durable” en tant que discours pour identifier la façon dont les systèmes de pensée des participant-es organisent les conceptions de l’alimentation et définissent les enjeux alimentaires les plus urgents dans la sphère publique dominante (Johnston et Baumann, 2010). Ce format aide ainsi à déterminer quels éléments du répertoire de “l’alimentation durable” semblent les plus importants pour les participant-es. Les éléments proposés ci-après n’ont pas la prétention de proposer une analyse fine mais ont vocation à dresser un bref tableau des conceptions et enjeux alimentaires associés à l’alimentation durable par les participant-es lors du jeu.

• Les aliments locaux et biologiques occupent une place centrale dans les répertoires des participants

Le biologique

L’évocation du biologique a mis en avant les différentes controverses qui pouvaient y être associées. Pour certains, le “bio” n’est pas écologique lorsqu’il s’inscrit dans une agriculture intensive et mondialisée. Dans ce cas, le bio ne fait pas parti du registre lié à l’alimentation durable contrairement au terme “raisonné” qui serait plus propice lorsque le bio est renvoyé à sa dimension écologique. Le prix des aliments biologiques a également été évoqué. Les participants ont fait part de leurs préoccupations quant aux prix conséquents des certaines denrées bio les rendant difficilement accessibles. Au delà du prix, le sens attribué au “bio” ne permet pas toujours à un public large d’y recourir, il peut être associé à certains groupes sociaux et en exclut par conséquent d’autres. Les controverses rapportées autour du “bio” sont un bon indicateur de ce qui semble être associé à l’alimentation durable : une alimentation de qualité et écologique, produite à proximité des lieux de consommation, extraite d’un système mondialisé, accessible symboliquement et monétairement.

Les circuits courts

L’évocation des circuits courts ont mis en perspective les rapports entretenus entre les villes et les zones périurbaines et rurales. La notion d’alimentation durable invite donc à se questionner sur la manière dont les denrées alimentaires sont produites et acheminées au sein des villes. Les discours et les rôles (du jeu) ont aussi fait apparaître l’hétérogénéité des pratiques agricoles : agriculture paysanne, agriculture intensive et agriculture urbaine ont été évoquées. Ces formes de productions alimentaires s’inscrivent dans des systèmes radicalement différents. Celles paysanne & en circuits courts et urbaines sont associées dans les discours à l’alimentation durable.

Dans le cadre du jeu, le protagoniste représentant une forme d’agriculture plus conventionnelle a pointé du doigt les verrouillages «socio-technique» auxquels il fait fasse pour changer ses modes de faire (rapports de domination avec les clients, investissements lourds pour transiter, changement culturel dans les pratiques professionnelles, modèle économique à repenser, etc). Pour ce qui est de l’agriculture urbaine, se pose la question du modèle économique de manière à garantir la viabilité d’une agriculture capable de produire des denrées alimentaires en plein coeur des villes.

• La qualité des aliments

Elle constitue également un élément central associé à “l’alimentation durable”. La qualité peut autant être associée à une dimension nutritionnelle qu’à un ancrage spatial : une alimentation de qualité est une alimentation locale. Par ailleurs, les participant-es se sont intéressés aux différents leviers favorisant l’accès à ce qu’ils considèrent comme une alimentation de qualité. Ces leviers sont avant tout politiques puisqu’ils invitent les collectivités locales à se saisir de ces enjeux et déployer des politiques publiques en faveur d’une alimentation de qualité dans les cantines scolaires, en traitant les problématiques des déserts alimentaires mais également dans des actions d’éducation à l’alimentation à destination de publics jeunes. Au delà du prisme sanitaire - nutritionnel, les actions d’éducation à l’alimentation plébiscitées visent à reconnecter la consommation à la production agricole de manière à rendre visible le circuit alimentaire, se reconnecter à une économie locale (en visitant des fermes pédagogiques par exemple) et au plaisir de manger (atelier pédagogique sur le goût des aliments).

Enfin, toujours à propos de la qualité, les participants ont pu mettre en visibilité (à travers leur rôle) la capacité des acteurs économiques à s’approprier les enjeux associées à l’alimentation durable et les traduire en fonction de logiques qui leur sont propres : des fruits et légumes pré-découpés et emballés pour favoriser le fameux “bien-manger” et s’adapter à un public “qui n’a pas le temps de cuisiner”.

Sans doute, derrière cette valorisation, on peut voir le reflet de l’idéologie du capitalisme (Boltanski et Chiapello, 1999) qui montre la manière dont les critiques formulées à l’encontre des acteurs agro-industriels sont intégrées (en partie) et nourrissent les transformations apportées par ces acteurs eux-mêmes. Aussi, ces manières de faire ont tendance à désamorcer les critiques (puisque appropriées par les acteurs agro-industriels à travers la mise en oeuvre de nouveaux produits) tout en gagnant en profitabilité.

• Le plaisir

La notion de plaisir se situe également au coeur des discours. Dans une perspective individuelle, les pratiques alimentaires sont intimement associées au plaisir. Cette notion de plaisir est à relier à une temporalité étroite et au contrôle perçu : s’orienter vers un type de repas plutôt qu’un autre s’est se procurer du plaisir à court terme et garder le contrôle sur son alimentation. C’est ce qu’a pu rapporter le personnage de l’écolière qui préférait et choisissait, bien que inscrite à la cantine, de se rendre le midi au fast food parce que considéré comme “meilleur”. Au delà du caractère individuel, cette pratique revêt une dimension sociale forte puisque aller au fast food, c’est suivre et se retrouver avec ses pairs. La dimension sociale du plaisir est ainsi étroitement liée à des phénomènes d’influence sociale. Aussi, l’écolière se différencie des autres élèves qui vont à la cantine tout en créant et en renforçant des appartenances et des liens sociaux à d’autres en inscrivant son alimentation dans une situation particulière, celle du fast food. Enfin, ajoutons que la relative précarité de beaucoup d’adolescents pourrait expliquer l’achat de produits “gras” et bon marché pour se restaurer et atteindre la satiété (Corbeau, 2017).

Conclusion

Le jeu a permis de mettre en évidence le caractère englobant de “l’alimentation durable” qui renvoie à des aspects variées ainsi qu’un rapprochement entre pratiques alimentaires individuelles et phénomène de transformation sociale et environnementale (Johnston, Rodney & Szabo, 2012).

MERCI À TOUS LES PARTICIPANT-ES !

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